CHAPITRE 4 - PARTIE 1
17h30
Lorsqu'elle rentra chez elle, Marie – comme
d'habitude – était épuisée après cette longue journée de travail. Elle se
disait qu'elle ne supporterait plus très longtemps cette vie trop rythmée, en
effet elle aimait le calme et prendre son temps, or à l'école, c'était tout le
contraire, elle devait courir entre chaque cour.
Dans
l'entrée, elle avait espéré voir apparaître son fils, mais il devait encore
être sous le coup de la colère à cause de ce matin. Qu'est-ce qu'il pouvait
être têtu quand il voulait, quelle tête de mule celui-là ! pensa-t-elle.
Alors,
elle prit son courage à deux mains et monta le trouver dans sa chambre.
Elle
frappa doucement à la porte, pas de réponse. Elle recommença, toujours aucune
réponse. Déçue par l'attitude de son fils, elle entra tristement. Mais le
spectacle qu'elle découvrit lui fit regretter immédiatement les pensées qu'elle
venait d'avoir.
En effet, couché en position
fœtale tout en suçant son pouce, Marc dormait blotti contre son nounours
préféré. Claire avait certainement dû le coucher avant de rentrer chez elle.
Marie dut lutter contre son envie de le prendre dans ses bras au risque de le
réveiller par la même occasion.
En le contemplant, elle
s'aperçut à quel point il était beau avec ses cheveux coupés courts qui
frisaient, sa peau métissée et douce, et ses grands yeux verts. Oui, elle était
heureuse qu'il ait au moins hérité de ses yeux. En pensant à lui plus tard,
elle se l'imaginait en vrai tombeur.
Au moment où elle allait
céder et le prendre dans ses bras, le téléphone sonna, elle sauta sur
l'opportunité de ne pas réveiller son petit bonhomme.
— Allô !
— Marie, c'est Jeanne.
— Comment vas-tu depuis ce
matin ?
— Bien, mais un peu
fatiguée.
— Le boulot ?
— Le boulot, la famille tout
quoi, je partirais volontiers une petite semaine à la montagne pour me relaxer.
— Tu devrais le proposer à
Jacques, moi je me ferais un plaisir de garder Claire à la maison.
— Pff ! Tu connais Jacques,
il ne voudra pas partir, il planifie toujours ses vacances un an à l'avance,
partir au dernier moment comme ça serait un véritable abandon de ses patients.
— Mais si tu lui expliques
que tu en as vraiment besoin, tu ne crois pas qu'il pourrait déroger à sa règle
rien qu'une fois.
— Je ne pense pas, non, mais
je vais quand même lui poser la question, et puis si tu peux prendre Claire
chez toi, ce sera un poids en moins.
— Bien sûr, tu sais bien que
tu peux compter sur moi. Pendant que j'y pense, pourrais-tu demander à Claire
si elle peut me garder Marc vendredi soir ?
— Oui pas de problème, je ne
crois pas qu'elle ait prévu quoi que ce soit. Mais je vais quand même lui poser
la question, attends.
Elle entendit Jeanne crier à
Claire si elle pouvait garder Marc ce vendredi soir. Sa réponse ne se fit pas
attendre, elle adorait Marc, elle ferait n'importe quoi pour lui, il était pour
elle comme qui dirait le petit frère qu'elle rêvait d'avoir. D'ailleurs, lui
aussi l'aimait beaucoup.
— Elle est okay pour
vendredi, répondit Jeanne.
— Cool, c'est un amour cet
enfant.
— Le portrait craché de sa
mère, plaisanta Jeanne.
— Ouais, ouais ! Je lui
dirai plus tard à quelle heure venir.
— Mais dis-moi si je ne suis
pas trop indiscrète, qu'as-tu prévu de faire vendredi ?
— Non, tu n'es pas trop
indiscrète, j'ai simplement prévu de sortir.
— Quoi sortir !…. sortir
avec un homme ?
— T'es vraiment forte en
devinettes.
— Doux Jésus, est-ce que
j'ai bien compris ! Tu vas sortir avec un homme, mais dis, je le connais ce
mec-là ?
— Je crois que tu as dû
l'apercevoir 2 ou 3 fois à l'école, il s'appelle Stephen.
— Stephen, Stephen, non son
nom ne me dit… ah mais si ! C'est bon je vois qui c'est, le beau gosse-là, le
prof d'anglais si je me souviens bien !
— T'as vu juste.
— Eh bien ! Pour un premier
rancard tu t'en sors pas mal, dis-moi.
— Tu sais, il n’arrêtait pas
de me saouler alors j'ai accepté, et puis j'ai 30 ans, je ne peux pas rester
seule toute ma vie.
— Oh si tu le peux, mais tu
ne le feras pas à cause, grâce, devrais-je dire plutôt, à Marc, n'est-ce pas ?
— Je ne peux rien te cacher,
tu as toujours su lire en moi comme dans un livre ouvert et ça m'agace,
dit-elle sur un ton amusé.
— Ben voyons, ma chérie, toi
agacée parce que….
— Jeanne, Jeanne, viens voir
vite !
C'était Jacques, son mari,
qui l'appelait ainsi. Marie ne l'appréciait que très peu, elle savait que
Jeanne regrettait de s'être mariée et d'avoir eu un enfant aussi jeune, surtout
avec son mari, cependant elle l'aimait plus que tout, et Marie trouvait cela
vraiment paradoxal. D'autant qu'il lui en faisait voir de toutes les couleurs,
comme s'il haïssait sa femme et sa fille, oui plus le temps passait et plus
Marie pensait qu'il devait les haïr.
— Excuse-moi, mais je dois y
aller. On se rappelle ?
Quelle question ! Elles
ne pouvaient pas passer un jour sans se parler, se dit Marie.
— Oui, au revoir.
— Au revoir mon chou ! (...)